jeudi 20 mars 2014

Chronique des deux rives Audin dans sa lumière

 
                                          Audin dans sa lumière
                 
 
 
 
 
Qui aura entendu la voix de Josette Audin après la sinistre révélation posthume du tortionnaire Aussaresses ?
Le voile est-il finalement levé près de 57 ans après l’assassinat du jeune mathématicien, militant du parti communiste algérien, ardent militant de la cause algérienne, Maurice Audin. Rien n’est moins sûr selon sa veuve, tant le sicaire Aussaresses  aura semé au départ  sur son chemin de   mensonges, de demi-vérités pour ensuite se répandre dans d’odieuses confessions qui mettent au jour un véritable système de liquidations des patriotes algériens. Et les mots de «  O », tel qu’il a été nommé il ya bien longtemps dans l’œuvre emblématique d’Yves Courrière « La guerre d’Algérie », évoquent «sans regrets ni remords »  le mal avec une banalité qui donne des sueurs froides rétrospectives.  "Eh bien on a tué Audin, voilà ! On l’a tué au couteau pour qu’on pense, si on le trouvait, qu’il avait été tué par les arabes"."Qui c’est qui a décidé de ça ? C’est moi"… ». Voila  à quoi se réduirait le mystère Audin  selon les aveux recueillis  par Jean-Charles Deniau dans un livre-document qui vient de paraître : "La vérité sur la mort de Maurice Audin" (éditions Equateurs).                                                       Jean-Charles Deniau  affirme que Maurice Audin a été assassiné sur les ordres du général Massu…                                                    
Pour Josette Audin: "Aussaresses est un être immonde qui a menti toute sa vie".
 
 
C’est en fait une véritable affaire d’Etat sur laquelle la lumière reste à faire.  Les propos posthumes d’Aussaresses   accréditent l’enquête  de  la journaliste Nathalie Funès  publiée en mars 2012  par le Nouvel Observateur, dans laquelle  celle-ci révélait l’existence d’un document inédit, conservé dans les archives de la Hoover Institution  en Californie. Il s’agit d’un manuscrit du colonel Godard, ancien commandant de la zone Alger-Sahel. Ce document contredit la thèse officielle selon laquelle Maurice Audin se serait évadé lors d’un transfert. Il confirme que le militant communiste a été tué par les militaires qui le détenaient et mentionne le nom de celui qui l’aurait assassiné. Jusqu'à présent, l'hypothèse la plus souvent évoquée  -toujours démentie par l'armée- était celle de Pierre Vidal-Naquet (décédé en 2006), l'auteur de "l'Affaire Audin". Selon Vidal-Naquet, Maurice Audin aurait été étranglé au cours d'un interrogatoire par le lieutenant André Charbonnier,  "dans un accès de colère».
La disparition-assassinat de Maurice Audin est une  affaire d’Etat qui fait partie des horreurs commises durant la dite « Bataille d’Alger ». Rappelons : Le 7 janvier 1957, Robert Lacoste,  gouverneur général de l’Algérie, reçoit du préfet Barret, avec l’accord de Guy Mollet, président du Conseil des ministres sous la IVème République française, l’autorisation de transférer la totalité des pouvoirs de police à un général de l’armée pour réprimer la résistance du peuple algérien. Le général Massu est désigné. Il constitue un état-major officiel avec le colonel Godard, comme chef état-major adjoint de la 10éme Division de parachutistes .La création, à côté de cet état-major officiel, d’un état- major clandestin composé de Roger Trinquier, chargé du " renseignement " et Aussaresses alors commandant, de " l’action ".
On peut penser  qu’en fait, Aussaresses laisse derrière lui, à titre posthume, une bombe à retardement en révélant que l’ordre serait venu de Massu lui-même avec l’assentiment des pouvoirs politiques de l’époque, c’est-à-dire du gouvernement Guy Mollet (PS)…
En 2000,  était publié un appel de douze personnalités  parmi lesquelles Josette Audin, Madeleine Rebérioux, Gisèle Halimi, Germaine Tillon, Henri Alleg pour la reconnaissance de la torture en Algérie. Où en est-on ? En  décembre 2012, le président François Hollande a fait un geste symbolique, en se recueillant place Maurice-Audin. Il a aussi  a exprimé ses regrets pour les souffrances infligées par la colonisation au peuple algérien…Pour Josette Audin tout en trouvant bien  ces gestes attend des autorités françaises qu’elles aillent jusqu’au bout, à savoir : «   Qu’elles condamnent ce qui s’est passé en Algérie : la torture, les disparitions forcées et les exécutions sommaires. Comme le président de la République Jacques Chirac l’avait fait pour la rafle du Vél’d’Hiv... ».
Sa voix a-t-elle été entendue ? Au cours des  journées surréalistes que la France de vient de connaître à la suite   de « l’affaire Dieudonné », il y avait peu de chance…                                        
La haine se combat sur tous les fronts.
 
A.K.

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