samedi 30 août 2008

CHRONIQUES DES 2 RIVES : Aimé CESAIRE







Papa Aimé
Aimé Césaire , l’athlète de la parole anticolonialiste contre la mort. Quelque fût l’issue de ce combat crépusculaire, Césaire l’ a ajouté à ses légitimes lauriers. Long, douloureux et triomphal chemin que celui de ce fils de la Martinique. Chemin dans sa vie d'homme et de poète. Quand il débarqua en France au début des années trente, la métropole est encore dans l'exaltation de sa « mission civilisatrice « avec l'Exposition coloniale et la commémoration emphatique du rattachement des Antilles. Etudiant brillant mais tourmenté, il est révolté par la condition humiliante faite à sa terre d'origine et plus encore par le drame subi par le continent africain. " Et l'on nous marquait au fer rouge et nous dormions dans nos excréments et on nous vendait sur les places et l'aune de drap anglais et la viande salée d'Irlande coûtaient moins chers que nous ».. En exil, à Paris, Aimé Césaire se forgera ses "armes miraculeuses" en rupture avec la " poésie de décalcomanie " des Antilles natales où l'on s'adonnait au sonnet… Pour Césaire, il fallait de toute urgence retrouver le point d'origine de l'homme noir, se dépouiller des oripeaux du paternalisme et mettre un terme à l'inféodation séculaire. mot « Négritude. " : « le fait simplement d'affirmer qu'on est nègre était un postulat révolutionnaire ". Son Cahier d'un retour au pays natal irradiera le destin de toute la littérature africaine d'expression française et au-delà . Frantz Fanon rapporte dans Peau noire masques blancs qu'une femme s'évanouit lors d'une conférence d'Aimé Césaire tant son français était " chaud "…Faut-il rappeler son Discours sur le colonialisme de 1950 ? " On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemin de fer… Moi je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, de cultures piétinées, d'institutions niées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties ". Paroles, creuset d'un vaste mouvement émancipateur à la recherche d'un nom pour la patrie comme le dira son contemporain algérien Jean Amrouche. Césaire est aussi homme des ruptures, comme celle qu'il marqua en 1956 avec le PCF pour cause de tiédeur à l'endroit des questions nationales. Sur le plan littéraire, il refusa l’inféodation au Surréalisme. Aimé Césaire " est un Noir qui est non seulement un Noir mais tout l'homme, qui en exprime toutes les interrogations, toutes les angoisses, tous les espoirs et toutes les extases et qui s'imposera de plus en plus à moi comme le prototype de la dignité » André Breton. Les luttes de décolonisation faisant leur son œuvre, Césaire fut parmi les premiers, notamment dans sa pièce La tragédie du roi Christophe (1963), à traiter du " soleil des indépendances "africaines :" la libération, c'est épique, mais les lendemains sont tragiques". Au soir de sa vie, Césaire n'a pas cessé de s'interroger et de nous interpeller : " A l'heure où nos identités, déçues par le mythe du progrès et dévastées par les faux universalismes, se réveillent, leur revendication ne peut-elle être que passionnelle et violente ? Affirmation de soi et négation de l'autre sont-elles inséparables ? ". Son œuvre poétique survivra à l'image d'un village africain, exubérante, tellurique, foisonnante, torride, sonore comme un tam-tam ponctuant peines et allégresses de la grande tribu humaine.



Une planète où les plus humbles, " ceux qui n'ont inventé ni la poudre ni l'électricité ", retrouvent leur grandeur solaire et ont voix dans l'histoire. Notamment, dans une langue qui naguère intruse est transfigurée par la parole abyssale des décolonisés en arme miraculeuse de portée universelle !
On a vu avec énergie le Vieil Homme se refusa aux sirènes assourdissantes de la « peopolisation »de l’Hexagone et fustigea le révisionnisme colonial.
Aux Antilles , on l’appelle tout simplement Papa Aimé
A.K.
N.B.: écrit le 14/04/08
Revu ce 30 août 2008


































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