samedi 15 mars 2008

ILES & MERS


KAVALA
En pensant à Patrikios







D’abord, il y eut la mer.
Je suis né entouré d’îles
Je suis une ile surgie le temps de voir
la lumière, dure comme la pierre
puis sombrer.
Les montagnes sont venues après.
Je les ai choisies.
Il fallait bien que je partage un peu le poids
écrasant ce pays depuis des siècles
Titos Patrikios



I

Jaillira-t-il enfin de retour
Le noir étalon hagard
Dans le cercle moisi des errances souillées
Cheval de Troie estropié
Devant les remparts de nos vies
Dédiées à la mer au partage malencontreux
De nos songes fiancés au désespoir

Mais peut-être n’est-ce qu’un malentendu,
Une protubérance d’adolescence en manque
De tendresse
Nous sommes en attente
Dans la nuit accouchant
Sur la paille des impostures
Combien de Grecs ont-ils décidé
Le sacrifice d’Iphigénie
Et combien de casbahs ont-elles répondu
Au long cri de détresse
Des jeunes filles nubiles
A Aulis
Fracassées dans le silence du jasmin


II

Le noir étalon porteur d’ardeur
N’est plus qu’un canasson de cirque en faillite
Promis en bout de course aux équarrisseurs
De temps à autre perce de ses pupilles dévorées par la cataracte
Un semblant d’éclair
Mais peut-être n’est-ce qu’un malentendu
Et parmi tant de rivages helléniques
Il se peut qu’en saison précise
Se lève la brume sur la vieille natale demeure en bois vermoulu
Du souverain qui fit don de son turban au Sphinx d’Egypte
Peut-être était ce un avatar guerrier d’Œdipe
Mais peut-être n’est-ce qu’un malentendu
Quand j’aborde dans un fracas de lumières ioniques
Kavala et son cercle marin des poètes ressuscités


III



Autour de maître Patrikios
Et sous un grand arbre élancé
Etait-ce un peuplier
crissant de nostalgie
Se promènent invisibles les vivants définitifs
Cavafis Seféris Rítsos Elytis
Ils sont parmi nous infortunés glorieux
Revenus du purgatoire













Et l’enfant d’Eldjezaîr
Sœur jumelle de Kavala
saisit au vol la main fraternelle de Patrikios
Loin des bouzoukis corrompus
Le pain et les poissons rompus
Sous les auspices romains de Lucio Mariani
Nous voguons vers l’empire désarmé
De la poésie où chaque mot blesse
Pareil à un grenadier enchanté
Lucio invoque Ephèse
Et allume impénitent un cigare
Patrikios dans un sourire amusé
Evoque Eros et ses miracles méditerranéens
Et Yannis
Et quand les oracles eurent fini
D’illuminer la nuit mouvante de Kavala
On entendit au désert
Le son d’une sirène de bateau
le sanglot d’une harpe
et le ricanement d’un étalon
le parfum errant de Donatella
il pleuvait cette nuit-là
à Kavala


Abdelmadjid Kaouah










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